La Revue canadienne d’identification des arthropodes et l’identification efficiente des arthropodes d’Amérique du Nord
«Idéalement, tous les insectes devraient être aussi faciles à identifier que les coccinelles et les papillons. Les coûts de l’identification seraient uniformément bas si, par exemple, on pouvait compter sur un site Web centralisé doté de liens conduisant à des clés régionales conviviales, richement illustrées et faisant autorité pour toutes les espèces suffisamment connues. Au lieu de nous inquiéter de ce qu’il en coûte pour identifier à répétition des espèces d’insectes individuelles, nous devrions consacrer nos énergies à l’élaboration d’outils qui nous permettront de faire ce travail plus facilement et avec plus d’exactitude.» [traduction libre] (Marshall, 2003 :
http://www.biology.ualberta.ca/bsc/news22_1/opinionpage.htm)
La plupart des espèces d’arthropodes du monde restent encore à décrire, et sont donc impossibles à identifier. Toutefois, des générations de taxonomistes des arthropodes ont accompli un travail relativement complet de description de la faune nord-américaine. La plupart des espèces d’arthropodes de l’est de l’Amérique du Nord et presque tous les membres des taxons plus importants et mieux connus ont été décrits et nommés. Pourtant, malgré l’état relativement avancé de nos connaissances taxonomiques, la plupart des arthropodes nord-américains demeurent fonctionnellement impossibles à identifier, sauf pour les spécialistes ayant accès à des bibliothèques, à des collections de référence et à des outils spécialisés. Ce fossé qui persiste entre l’achèvement d’une infrastructure taxonomique et sa traduction en un outil d’usage général nous a été légué par l’histoire : il reflète les coûts et les difficultés que présentait la production et la diffusion d’outils d’identification à l’époque pré-numérique. Jusqu’à très récemment, les taxonomistes étaient relativement peu nombreux à pouvoir produire et reproduire des images adéquates de tous les taxons et de toutes les caractéristiques utilisées dans leurs descriptions et leurs clés. De plus, peu d’entre eux étaient capables de constituer des bibliothèques d’images ou avaient les moyens de les publier. L’ajout de quelques images en couleurs dans les publications imprimées était très coûteux (ce l’est encore aujourd’hui), et ces publications ne restaient de toute façon accessibles qu’à un nombre relativement restreint de spécialistes.
Cette situation a changé du tout au tout au cours des quelques dernières années. La photographie numérique — même de structures et de spécimens de petite taille — est facile à maîtriser et relativement peu coûteuse. De plus, comparativement aux publications imprimées, le Web permet aujourd’hui de diffuser efficacement, rapidement et à peu de frais des documents richement illustrés à un public beaucoup plus large. Les taxonomies récemment publiées, en particulier celles diffusées par voie électronique comme Zootaxa, risquent de devenir beaucoup plus accessibles et conviviales que les publications imprimées du passé. En fait, autant les revues taxonomiques des quelques dernières décennies n’auraient pu se passer d’une clé dichotomique, autant les taxonomies d’aujourd’hui ne pourraient être jugées complètes sans l’ajout (ou la diffusion en parallèle sur le Web) d’une clé numérique adéquatement illustrée. La RCIA encourage la publication de telles clés fondées sur les résultats de nouvelles études taxonomiques, mais les études récentes traitant principalement des arthropodes bien connus d’Amérique du Nord restent relativement rares. Cette tâche importante de mise à jour des outils afin de rendre les arthropodes nord-américains facilement identifiables exige un retour aux ouvrages du passé, et les personnes qui justifient de l’expérience taxonomique nécessaire ont aujourd’hui la responsabilité et la chance de «compléter» le travail de leurs prédécesseurs en rendant les espèces déjà identifiées et nommées accessibles grâce à la publication sur le Web de revues taxonomiques incluant des clés numériques illustrées.
Les articles publiés jusqu’à maintenant dans la RCIA montrent que cette méthode peut permettre de lever les «obstacles taxonomiques» qui compliquent l’identification de la plupart des espèces déjà décrites tout en mettant en évidence et en cernant les problèmes qui restent toujours à résoudre — par exemple, les complexes cryptiques d’espèces ou les espèces non décrites. La plupart, sinon la totalité des taxonomistes ont consacré une part considérable de leurs activités professionnelles à l’acquisition d’une connaissance approfondie de leurs taxons de prédilection, et sont donc en mesure d’identifier facilement les taxons dont ils sont devenus les spécialistes. Cette connaissance peut aujourd’hui être traduite facilement en outils faciles à utiliser par d’autres, et tous les spécialistes nord-américains des arthropodes devraient saisir cette chance.
La Revue canadienne d’identification des arthropodes est une revue dont les articles sont entièrement évalués par des pairs et qui est en train de devenir une source importante d’études taxonomiques spécialisées et d’outils numériques efficients et universellement accessibles pour l’identification rapide des arthropodes. Elle répond ainsi aux besoins des utilisateurs, tout en offrant aux auteurs l’occasion unique de contribuer à l’établissement d’un ensemble croissant d’outils numériques en partageant leurs connaissance régionales spécialisées. Nous avons besoin de votre collaboration pour faire de la RCIA une source importante d’études et de clés qui feront autorité pour l’identification d’une vaste gamme d’arthropodes d’Amérique du Nord et du reste du monde.
Steve Marshall
Octobre 2008